mardi 26 avril 2016

Saccage du local de la CNT Lille par la Police Un cran plus serré dans la repression des luttes

Mise à jour du 23/04/2016 en fin d’article

Ce mercredi 20 avril, la manifestation contre la loi travail à Lille, qui réunissait quelques centaines de manifestants, s’était déroulée sans heurts majeurs.
Selon des témoins, après la dispersion, une partie des manifestants aurait tenté de rejoindre l’insoumise, librairie autogérée, pour y tenir une AG, mais la police en interdisait l’accès, évidemment sans fournir d’explication sur ce qui pourrait motiver l’empêchement de se réunir dans ce lieu privé.

Des militants CNT avaient quant à eux regagné leur local, à une centaine de mètres plus loin dans la rue, pour y ranger le matériel et faire le point. Et avaient été rejoints peu de temps après par d’autres camarades, familiers de l’insoumise, justement.

C’est alors que les forces de l’ordre sont arrivées au local, tambourinant contre la porte et exigeant de rentrer, sans expliquer le moins du monde les raisons de leur demande.

La vidéo filmée par un voisin qu’on retrouve sur le site de la CNT Lille montre la délicatesse avec laquelle la flicaille invite les occupants du local à leur ouvrir la porte... « amenez-moi rapidement un bélier ou une masse ce sera plus simple », dit l’un deux... pendant qu’un autre "vérifie" consciencieusement la solidité de la vitrine, et qu’un autre encore tente d’enfoncer la porte à coup d’épaule.
« Allez ouvrez la porte, là ! »  intime un autre flic « Pourquoi ? » distingue t-on depuis l’intérieur  « on va discuter, ouvrez ! » répond-il.

Il me semble que dans l’histoire des trois petits cochons, le loup s’arrête un moment d’essayer de forcer la porte de la maison de briques pour tenter, entre deux menaces, d’amadouer Nafnaf exactement de la même manière...

Quelques minutes plus tard, c’est effectivement à coups de bélier que les forces du désordre s’attaquent à la porte d’entrée et finissent par la défoncer totalement.



La suite nous est racontée par D., de la CNT Lille, qui était dans le local à ce moment là :

« Ils sont entrés en cow-boy, ils ont fait coucher tout le monde à plat ventre... ils se sont lâchés, quoi... Rien de très étonnant, finalement, une attitude habituelle de flics...»

Sur la vidéo, on distingue à travers la vitrine, immédiatement après l’intrusion de la police, du mobilier voler, et moins de trente secondes plus tard, deux personnes sortir du local solidement maitenus par les policiers.
«  Les deux camarades qu’ils ont arrêtés, c’est ceux qui nous avaient rejoint. D’après eux, ils étaient en train d’ouvrir l’insoumise pour accueillir l’AG quand les flics leurs sont tombés dessus, sans explication. Ils avaient réussi à leur échapper et étaient venus chez nous. C’est tout ce qu’on savait, à aucun moment, malgré nos demandes, les flics ne nous ont dit pourquoi ils voulaient entrer, ni pourquoi ensuite ils ont arrêté les camarades. Et ils n’avaient aucun papier qui les autorise à entrer dans un lieu privé 
- « Mais tu sais que même sans commission rogatoire, les flics peuvent entrer dans un lieu privé dans le cadre d’une poursuite après un flagrant délit ? [note]
- « Peut-être, mais nous on n’avait aucun moyen de savoir ce qui s’était passé avant |NDLR : ni si ça s’etait vraiment passé...], et les flics ne nous ont rien dit, à partir de là, on est chez nous, on n’a pas à ouvrir aux flics s’ils n’ont rien à nous présenter qui justifie leur intervention »


Dans les éditions web de la Voix du Nord et de Nord-Éclair, on lit exactement le même article – pourquoi chercher plus loin que le bête recopiage des communiqués de la préfecture ? – qui explique que « Selon la police, au retour de cette mobilisation contre la loi Travail, des individus ont commis des violences sur cinq policiers, aux abords du local de la CNT (Confédération nationale du travail), rue d’Arras (Moulins), où ils se sont réfugiés. Nous leur avons demandé de sortir, mais ils ont refusé ».

De quoi, postérieurement, justifier légalement l’intervention...

- « Il y avait un officier de la PJ avec eux ? [note]
- «  On ne sait pas... c’est possible, il y avait de toutes façons beaucoup de flics, mais personne ne s’est présenté à nous pour justifier d’une quelconque autorité à entrer. Et puis, il ne s’en sont pas tenus à l’interpellation : ensuite, ils ont fait une fouille en règle et tout retourné, fouillé dans tous les papiers [note] ... et ça, c’est au delà du fait d’entrer pour arrêter quelqu’un. C’est un local syndical, il n’ont pas à fouiller dans les papiers du syndicat »

A l’heure où nous écrivons ces lignes, les deux personnes interpellées sont toujours en garde à vue et devraient être jugés en comparution immédiate aujourd’hui même.

On sait comment actuellement, en cas d’affrontements durant une manifestation, les arrestations qui suivent sont le plus souvent totalement arbitraires.
On sait aussi comment la police provoque elle-même ces affrontements, soit directement (en coupant les manifestations en deux, en bloquant des parcours pourtant prévus, en multipliant les provocations...) soit grâce à l’intervention de faux « éléments-provocateurs » infiltrés... tel qu’on en voit justement un dans la vidéo de la CNT (à 0’59, qui prend un tonfa des mains d’un de ses collègues occupé à « tester » la vitrine)
On comprend donc à quel point il est facile pour la police de sortir du chapeau des « personnes qui ont commis des violences envers la police » pour criminaliser toute lutte sociale.

Avec cette intervention dans un local syndical privé, dont la violence a pris des allures de vengeance, la répression a franchi un pas de plus.

D. précise que la CNT Lille va saisir la justice suite à cette intervention : une affaire que nous suivrons de près.
N’hésitez pas à consulter le site de la CNT Nord-Pas-de-Calais : un appel à soutien devrait y être prochainement lancé.

Mise à jour du 23/04 :
- Un appel à solidarité financière a effectivement été lancé par la CNT 59/62, vous pouvez participer via ce lien : https://www.leetchi.com/c/solidarite-de-cnt-lille
- Grâce à leur avocate, les deux camarades arrêtés ont heureusement refusé le jugement en comparution immédiate [note] . Ils ont été immédiatement relâchés, malgré les réquisitions du procureur qui réclamait une mise en détention préventive. Leur procès aura lieu le 25 mai à 14 heures, d’ici là, ils sont interdits de manifestations et de rassemblements.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire